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Un masque spécialement conçu pour les personnes malentendantes

Alors que le port du masque se démocratise, cette créatrice toulousaine a décidé de créer un modèle inclusif pour faciliter la lecture labiale. Elle nous détaille son projet destiné aux personnes sourdes et malentendantes, mais qui pourrait intéresser le plus grand nombre.

C’est une sortie à la pharmacie qui a créé le déclic. Une excursion somme toute anodine pendant le confinement qui a laissé Anissa Mekrabech "sonnée". Car sur place, la créatrice en maroquinerie toulousaine, atteinte de surdité moyenne bilatérale depuis sa naissance, s’est retrouvée face à un marquage au sol pour respecter le mètre de distanciation sociale, à une vitre en plexiglas et du personnel masqué. "J’ai été un peu perdue", raconte la jeune femme de 30 ans. "Je n’ai pas réussi à entendre quand on m’a parlé. Je leur ai dit qu’habituellement, je m’appuyais sur la lecture labiale, ce qui était impossible dans cette situation. Les lèvres sont mes oreilles. Si elles sont cachées, je ne peux pas entendre ou comprendre."

Désarçonnée et se projetant dans un "monde d’après" particulièrement brutal, Anissa Mekrabech a alors une idée : formée il y a deux ans à la langue des signes américaine, elle avait repéré au cours de ses recherches un modèle de masque inclusif conçu par une femme sourde aux Etats-Unis. Pourquoi ne pas déployer cette initiative chez nous ? Aussitôt, elle se lance. Et met à profit le temps que lui laisse le confinement pour créer et expérimenter. "J’ai d’abord fait un premier prototype à la maison où j’ai mon atelier. Comme je suis créatrice en maroquinerie, j’ai beaucoup d’équipement. J’ai retravaillé le patron sur un deuxième prototype."

Son objectif ? Fabriquer un masque inclusif avec une bande transparente qui facilite la lecture labiale et la visibilité de l’expression du visage. Car la démocratisation du port du masque dans l’espace public pose la question de l’isolement et de l’exclusion des personnes sourdes et malentendantes. "Je le constate : quand je fais mes courses, j’ai tendance à éviter le regard pour éviter toutes conversations. C’est inconscient. On ne regarde pas le ou la caissière, on regarde le sac à mains et on s’en va en baissant les yeux."

Mais ce projet ne s’adresserait pas seulement aux personnes atteintes de "particularités" (Anissa rejette le mot handicap). Car la problématique du masque impacte la communication au sens large et le lien social du plus grand nombre. "A la base, je le concevais plutôt pour l’interlocuteur pour que les sourds puissent s’appuyer sur la lecture labiale", souligne-t-elle. "Mais au fil du temps, je me rends compte que cela touche beaucoup de monde : le personnel de la petite enfance pour la communication non-verbale auprès des petits, les professionnels paramédicaux comme les orthophonistes ou les audioprothésistes, les professionnels de la restauration et de l’hôtellerie pour la relation aux clients avec l’expression du visage qui est capitale."

Largement soutenue, l’artisante a lancé une cagnotte de crowfunding pour financer sa belle idée inclusive. Une initiative qui lui a valu des commentaires enthousiastes émanant de personnes pourtant "pas concernées" et une récolte de fonds qui surpasse ses espérances. A ce jour, sa cagnotte a rassemblé plus de 17 000 euros (sur un premier objectif de 5000 euros). Forte de ces retours, elle aborde aujourd’hui une étape décisive : après avoir trouvé un fabricant, la créatrice va peaufiner son prototype, le tester sur un échantillon de personnes, puis l’envoyer à la DGA (Direction générale de l’armement), avec l’appui du gouvernement, qui le validera. "Hors de question de lancer une production qui ne serait pas aux normes."

Si le tarif de son masque inclusif n’a pas encore été fixé ("Cela dépendra du coût de revient"), Anissa Mekrabech se refuse à le vendre à prix d’or. "Il faut qu’il soit accessible au plus grand nombre", insiste-t-elle.

Abordant cette période anxiogène avec philosophie, la créatrice se réjouit que son projet ouvre le dialogue et mette en lumière des problématiques jusqu’alors trop peu abordées. "La surdité, dont le spectre est très large, s’oublie facilement car c’est une particularité invisible. J’espère que cette crise sera l’occasion de progresser en termes d’accessibilité et de visibilité", souligne Anissa. "Et puis ce masque peut profiter à toute la population puisqu’il permet de voir un sourire, une expression de visage rassurante et bienveillante." C’est peu dire que nous en avons besoin en cette période troublée.

Repris par Brice P. BANDO, Point focal PROADIPH-Togo

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